Qui gagne de l'argent sur internet?

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Paru le 1 Avril dans Entreprise

Sur la centaine de sites internet lancés en Suisse chaque mois, 5% seulement rentabilisent leur activité. Leur secret? Ils sont les premiers dans leur domaine et, grâce à la qualité de leur offre et de leur interface, fidélisent la clientèle avant que des concurrents ne fassent leur apparition.

Malgré l'essor de la nouvelle économie, peu d'entreprises gagnent de l'argent sur internet. Au niveau international, on cite souvent EasyJet, Nespresso ou Dell; à échelle plus réduite, les belles histoires sont plus rares.
En Suisse, eboutic.ch figure parmi les exemples de succès récents. Le site organise des ventes privées de produits de marques dans divers domaines tels que le prêt-à-porter, les accessoires de mode, l'équipement pour la maison, les jouets, etc.

Lancée en 2007, l'entreprise emploie aujourd'hui une trentaine de personnes, dont les deux tiers ont été engagées l'an dernier. c'est d'ailleurs en 2009 qu'elle a atteint l'équilibre économique et enregistré un chiffre d'affaires de 7 millions de francs. « Notre croissance est de 400% par rapport à 2008 et nous attendons encore une croissance à trios chiffres cette année », précise Arthur Dauchez, directeur d'eboutic.ch

Le site cible uniquement les Suisses (âge moyen 25-45 ans), qui sont d'ailleurs déjà 350 000 à s'y être inscrits. « Le nombre d'adhérents va augmenter », se réjouit Arthur Dauchez. « La génération web - les jeunes nés après 1980 - commence à gagner sa vie et à avoir un certain pouvoir d'achat.»

Le principal avantage de l'entreprise est d'avoir été le premier site de ventes privées en ligne: « Lorsque nous avons créé ce concept, il a suscité l'intérêt des journalistes, qui ont beaucoup parlé. » par la suite, le bouche-à-oreille - principal canal de marketing - a fait son effet.

ÊTRE PIONNIER
Première « épicerie en ligne », rachetée par Migros, LeShop dégage des bénéfices depuis trois ans. Ils sont totalement réinvestis dans son développement. En 2009, l'entreprise a enregistré un chiffre d'affaires de 132 millions de francs, contre 67 millions pour son concurrent Coop@home. Lea deux entreprises proposent près de treize mille produits, principalement alimentaires. Leur clientèle cible? La femme active, mère de famille, qui n'as pas le temps de faire ses courses. chez LeShop.ch, le caddie moyen est de 228 francs contre 120 francs pour Coop. comment LeShop (qui détient 67% du marché) maintient-il sa position de leader? « Nous avons commencé trois ans avant Coop », répond Dominique Locher. « Trois années difficles, mais durant lesquelles nous avons pu nous perfectionner, apprendre de nos erreurs, sans nous soucier de la concurrence ». Les clients prennent leurs habitudes et, si le service est bon, préfèrent ne pas changer de fournisseur.

L'histoire de l'entreprise explique que aussi son succès. « Avant notre rachat, nous devions nous battre seuls contre les géants Migros et Coop. Nos emplois et nos salaires étaient en jeu, ce qui motive énormément une équipe. Chez Coop@home, on pouvait dès le début se reposer sur la structure du groupe ».
Swissquote, premiére banque en ligne du pays, compte cent trente mille clients pour un chiffre d'affaires d'environ 100 millions de francs en 2009. L'entreprise propose une plate-forme de trading et se rémunère sur les transactions, ainsi que par les revenus classiques des banques: taux d'intérêts, frais de dépôts, etc.

Aujourd'hui leader en Suisse, avec 50% des parts de marché, le site a également bénéficié de l'effet de pionnier puisqu'il était en 1997  le premier portail d'information financière de Suisse. « Pour les nouveaux arrivants qui essaient d'exploiter le même créneau, c'est plus difficile et les investissements marketing sont plus substantiels », résume Marc Bürki, CEO et cofondateur de l'entreprise.

PROXIMITE
Autre exemple de réussite suisse du commerce en ligne: le site d'enchères Ricardo.ch. Lorsqu'il arrive sur le marché en 1999, son concurrent américain eBay est déjà présent sur la toile helvétique. Ricardo a pu se faire une place - de choix puisqu'il domine aujourd'hui le marché suisse avec 90% des parts - en misant sur la proximité: « Par exemple, nous avons une version francophone du site, ce qu'eBay n'a pas jugé nécessaire, estimant que le marché suisse romand », explique Heiner Krobe, directeur de Ricardo.ch.

L'entreprise a plusieurs sources de revenus: frais de publication, frais de clôture, options de publication, toujours facturés aux vendeurs.Des transactions qui lui ont permis d'enregistrer en 2009 un chiffre d'affaires de 600 millions de francs et une croissance à deux chiffres. Avec une clientèle très variée: « L'âge moyen de nos membres est de 40 ans, mais certains sont beaucoup plus âgés. Près de 20% ont plus de 55 ans ».
 
Les clés du succès
Un site ergonomique et de qualité, un bon service client, un modèle économique ancré dans le long terme, une clientèle de proximité et, surtout, être pionnier dans son domaine. Tels sont les principaux facteurs de succès avancés par les spécialistes du secteur. « Sur la centaine de sites internet qui se créent chaque mois, seuls 5% gagnent de l'argent, 15-20% vivotent, tandis que les autres cessent leur activité en douceur » évalue Martin Demierre, de TouchMind.com, une entreprise spécialisée dans la création de sites et le développement de stratégies online. Et le spécialiste d'ajouter que le secteur de la vente online représentera, dans moins de cinq ans, jusqu'à 15% du commerce de détail, comme en Angleterre, contre 6% actuellement en Suisse: « Cette marge de croissance explique pourquoi, à ma connaissance, peu de sites de vente en ligne échouent ».

David Sadigh, directeur associé d'IC-Agency, société spécialisée dans le marketing en ligne, évoque de son côté le boom de l'internet nomade. Des marques fortes, à l'instar de Swissquote ou de LeShop, en Suisse - leurs applications iPhone sont parmi les plus téléchargées du pays - partent avec un avantage compétitif dans la course qui déterminera les leaders de l'internet mobile. En effet, la clientèle nomade se tournera vers des marques connues, qui rassurent et inspirent confiance et qu'elle fréquente déjà avec un haut niveau de satisfaction dans le monde digital. Pourtant, tous restent convaincus qu'internet ne va pas remplacer le commerce de proximité. « Parce que les Suisses habitent près des commodités et qu'internet est surtout utile pour les personnes qui n'ont pas la possibilité de se rendre directement dans les commerces, comme aux Etats-Unis, par exemple, répond Martin Demierre. « Les gens ont besoin de voir les produits, de les toucher, de les essayer et surtout d'avoir un endroit où se rendre et un interlocuteur à qui parler en cas de problème ».

Par Anne Hammer

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